Le karaïsme
est un secte juive qui a pris son essort à partir de la Crimée . Ses
membres les plus connus, à défaut d'être les plus nombreux, se trouvent
en Lituanie. Les Karaïme N.B. : un karaïte , des karaïme (sans s final)
Le karaïsme
a vu le jour en Mésopotamie en 760 en tant que secte dissidente du
judaïsme. Son fondateur est un rabbin nommé Anan ben David, un érudit
juif de Babylone, et elle fut de ce fait appelée primitivement
Ananisme. Il rejeta toute référence au Talmud, se basant uniquement sur
l'enseignement de la Torah (les 5 livres de Moïse), et proclama le
droit et le devoir de tout juif de pouvoir interpréter la Torah son
propre point de vue, sans référence à une quelconque interprétation du
rabbinat que sont les écritures de la Mishnah et du Talmud.
Popularisée par des écrits de qualité,
la doctrine karaïte s'étendit parmi les communautés juives d'Irak et de
Perse, puis gagna les bords de la Mer Noire, pénétrant le khanat des
Khazars au début du 10ème siècle (certains les considèrent d'ailleurs
comme des descendants des Khazars, mais il ne semble pas que ce soit le
cas). Les classes dirigeantes et une partie des tribus turques de
Crimée et du Caucase se convertirent à la nouvelle religion, notamment
le prince Bulan qui régnait sur le khant de Khazar. Cependant, seule
une partie de la population se convertit.
Au cours des années, les Turcs karaïme
se sont déplacés et se sont établis en Lituanie, en Pologne, dans
certaines régions de l'Ukraine, de Russie (où ils furent souvent mieux
traités que les Juifs orthodoxes), de Turquie, et plus récemment en
Israël, en France et aux Etats-Unis. En 1795, l'impératrice Catherine
II dispensa les Karaïme de Russie du paiement d'une double taxe imposée
aux Juifs et les autorisa à acquérir des terres. En 1827, ils furent
même dispensés de service militaire, privilège dont ne bénéficièrent
pas les Juifs orthodoxes. Les autorités nazies considérèrent en 1939
les Karaïme comme des non-Juifs et ils échappèrent ainsi aux massacres.
A la fin de la 2ème guerre mondiale, la seule communauté karaïte de
grande importance vivait en Egypte, mais la plupart émigrèrent en
Israël après 1956.
L'histoire des Karaïme de Lituanie
mérite d'être contée. Le Grand Duc Vytautas, dont l'empire s'étendait
de la Baltique à la Mer Noire (englobant les territoires actuels de la
Lituanie, de la Pologne, de l'Ukraine et de Crimée), ramena 383
familles karaïme de sa deuxième expédition de Crimée en 1388 pour en
faire les gardiens de son château de Trakai (alors capitale du
Grand-Duché), alors qu'en Crimée ils vivaient de l'horticulture et du
tabac. Une partie s'installa également comme secrétaires, interprètes,
cultivateurs et artisans. Les Karaïme qui servaient dans l'armée
étaient assimilés aux nobles alors que les autres jouissaient d'une
large autonomie. Depuis, cette communauté s'est toujours maintenue à
Trakai, a conservé ses coutumes et son langage propre, un dialecte turc
du groupe kipchak, et son temple (kenessa) est toujours en fonction. Le
600ème anniversaire de son installation a été largement fêté en 1989.
On estime qu'aujourd'hui le nombre de
Karaïme dans le monde est inférieur à 50 000 personnes. L'Etat d'Israël
, qui en abrite environ 30 000, les considère formellement comme Juifs,
mais tous les Karaïme ne se considèrent pas comme tels. En 1991 on en
recensait 800 en Crimée ukrainienne, 280 en Lituanie, 150 en Pologne et
une centaine à Moscou. En France, leur nombre est estimé à une centaine
à Paris et une vingtaine à Marseille.
Article de Gilles Dutertre
du 30 Juin 2003 sur le site www.colisee.org